Concert hydrophonique Immersif en 8.12 points.
Du plus haut vers le plus bas, l’eau choisit toujours la pente la plus favorable pour tracer son cours.
Lors de ses déambulations, l’eau développe des langages aussi variés que les langues des hommes…La chute d’un flocon de neige, qui, dans sa grande délicatesse nous donne à entendre le silence, quelques gouttes résiduelles atterrissant sur une feuille après la pluie, le plic majestueux dans le ventre de la grotte, le crissement de la glace gonflée par le gel, le ruissellement sifflotant d’une source vive, le rugissement terrifiant des vagues sous la tempête…
De tous temps, les hommes et les femmes ont cherchés à établir un dialogue avec l’eau en frappant à mains nues la surface de l’eau, en construisant des tambours d’eau, en installant des fontaines chantantes au centre des villages…
Nombreux sont les compositeurs, en occident, qui ont tenté d’approcher le langage de l’eau sur des instruments classiques : Claude Debussy et ses Nuages, Brouillards, et Jardins sous la pluie, les Jeux d’eau de Ravel, l’ Orage de Jean-Philippe Rameau, La Tempête de Piotr Ilitch Tchaïkovski ou Rain coming de Toru Takemitsu…Tous et bien d’autres se sont appliqué à célébrer, par évocation et métaphores, la langue des eaux.
Inspirés par la musique concrète et électronique, trois compositeurs de la MANB ont souhaité accueillir l’eau dans leur espace de jeu. A l’intérieur d’un cercle de huit haut-parleurs, au sein duquel sont réunis les 3 interprètes et le public, les compositeurs ont planté 4 arbres à sons formant une voute sonore, une clepsydre centrale amplifiée et 3 totems aquatiques équipés de goutte-à-goutte et de capteurs divers. L’ensemble forme un « orchestre aquatique multiphonique » joué et interprété directement sur les totems par les 3 musiciens, et modelé, dirigé, spatialisé grâce à des interfaces gestuelles sensibles à l’intention musicale.
Ainsi, au cœur d’une clairière, au milieu d’un champ, en haut d’une colline, sous un préau, une place publique, un hangar, une grange, un chapiteau… L’AIR DE L’EAU nous donne à entendre une symphonie concertante construite avec des mots et des syllabes aquatiques, ponctuée par des témoignages d’hommes et de femmes.
Une orchestration envoutante, étonnante, caressante et rafraichissante.
Captation du concert donné le 30 juin 2024 au château d’Azay le Ferron dans le cadre du partenariat avec le Parc Naturel de la Brenne.
Réalisation vidéo Quentin AURAT (https://quentinaurat.com)
Composition musicale originale dans le cadre de l’Appel à Manifestation d’Intérêt porté par la Fédération Nationale des Parcs Naturels Régionaux, la SACEM et le Ministère de la Culture.
Ce projet, a été construit en coopération avec le Parc naturel régional Loire-Anjou-Touraine et le Parc Naturel Régional de la Brene.
Trois compositeurs, Vincent Espéron, Rémi Dury et Cyril Berthet, membres du collectif de la Manufacture des Arts Numériques de Bourges, ont construit cette composition autour des liens que les habitants ont avec l’eau. Ils ont tendu leurs oreilles et leurs microphones sur tous ces phonèmes et mots aquatiques que contient le langage de l’eau pour faire naître une relation commune avec le langage humain.
Parallèlement, avec l’ethnologue Guillaume Étienne, ils ont collecté sur les territoires de la Brenne et du Loire-Anjou-Touraine, les paroles d’hommes et de femmes reliés à l’eau de manières différentes. A partir de ces collectes, ils ont créé une scénographie leur permettant de jouer, assembler et orchestrer ces différents langages.
Le public, placé au centre de cet espace est en immersion sonore à proximité de cet instrumentarium spécifique joué par les musiciens.
LE LIEN
Le lien c’est « ce qui nous lie »
mais c’est aussi « celles et ceux qui nous lient »
Celles et ceux qui tissent ce lien.
Le lien entre la nature et l’humain
entre l’humain et la nature.
Celles et ceux qui lissent ce lien.
Entre la nature de l’humain
et la nature sans humains
Celles et ceux qui réparent ces liens.
Dans le grand orchestre de la nature
on peut sans doute entendre de loin en loin
quelques noms d’oiseaux voler
quelques injures difficilement retenues adressées à ces humains. Celles et ceux qui ont trahis ces liens.
Écoutons ces complaintes qui nous lient.
L’AIR DE L’EAU
La connaissance, la protection et la valorisation des milieux naturels, de même que la relation entre les humains et leur environnement comptent parmi les objectifs des Parcs Naturels Régionaux. La biodiversité est toutefois souvent envisagée sous l’angle du visuel : on dénombre, répertorie et valorise les espèces animales ou végétales présentes à partir de photographies ou de films. Or la dimension sonore de cette biodiversité est tout autant instructive et mérite qu’on s’y attarde car elle dit quelque chose des relations entre ces espèces. En effet, la biodiversité, ce n’est pas seulement l’ensemble des espèces prises individuellement, c’est aussi et surtout les relations qui les lient et les rendent interdépendantes. Par ailleurs, l’humain est souvent considéré comme une espèce à part alors que nous faisons aussi partie de ces territoires et biodiversité. Nous vivons en effet dans des environnements sonores que nous contribuons aussi nous-mêmes, humains, à façonner, ayant une place dans ce grand orchestre de la nature décrit par Bernie Krause (2018).
Dans cette biodiversité, l’eau joue un rôle de premier ordre. Elle est constitutive des organismes, elle leur fournit aussi des conditions de vie et permet le développement de multiples espèces et végétaux. Sous différentes formes et états, en mouvement ou immobile, tombant du ciel et gorgeant les sols, l’eau semble omniprésente et pourtant elle se raréfie, au point de questionner son accessibilité à tous comme nous le rappellent les actualités en matière de sécheresse en ce début de XXIe siècle. Parce que l’eau constitue à la fois un point commun des territoires des PNR Brenne et Loire-Anjou-Touraine et un objet de singularité (eau des étangs / zones humides de la Loire), nous proposons d’interroger cet élément à travers ses sonorités. Que dit l’eau du lien entretenu entre les différents habitants (humains, animaux, végétaux) et de leurs relations d’interdépendance ? C’est à travers ses sonorités que nous proposons de questionner ces liens. L’eau est pourtant silencieuse en elle-même et ne « sonne » qu’à travers les relations qu’elle entretient : avec les sols ou les toits qui la font crépiter lorsqu’elle tombe du ciel, avec les rives du fleuve lorsqu’elle se meut, avec les poissons qui frétillent, avec les humains qui la domestiquent dans les étangs et la font circuler… A la fois silencieuse par nature et sonore par ses liens, l’eau raconte toujours son parcours à travers les sons qu’elle émet. En suivant les sonorités de l’eau, c’est donc un ensemble de relations d’interdépendance que l’on peut éclairer de façon originale.
Des formes de relations variées
La création musicale prendra comme base les liens entretenus entre les humains et leurs environnements à travers cet élément fondamental qu’est l’eau. A partir de quatre grands types de rapport à l’environnement observés dans les sociétés humaines, la composition intégrera ces formes de relations, de pratiques et de représentations de « la Nature » à travers l’eau :
– une approche anthropocentrée (centrée sur l’humain) qui considère que la Nature n’existe qu’à travers l’humain qui peut (et doit) l’exploiter. La Nature est utile à l’humain et ce dernier en fait usage pour lui-même. La raréfaction des ressources en eau constitue est l’indice de cette forme d’exploitation de la Nature.
– une approche écocentrée (centrée sur la Nature) qui considère que celle-ci doit être protégée avec intervention humaine (mise en place de lois, de normes, de territoires protégés, de compensations sur son utilisation…).
– une approche biocentrée, c’est-à-dire une deuxième approche centrée sur la Nature mais considérant que celle-ci doit être protégée sans l’humain : moins l’humain intervient, mieux la Nature se porte et c’est pourquoi il faut mettre en place des territoires excluant la présence humaine.
– une approche non duelle considérant qu’il n’y a pas de séparation humain/Nature : les humains vivent dans des environnements desquels ils font partie, sans avoir de place supérieure ni de relation d’ascendance sur ceux-ci.
Une création musicale contemporaine en plusieurs phases
Ce projet a pour objectif de développer une création de musique contemporaine électroacoustique avec la contribution des personnes et collectifs vivant sur ou à proximité des PNR Brenne et Loire-Anjou-Touraine. L’approche privilégiée est celle d’une composition ancrée dans les territoires. Pour cela, quatre phases se déroulent concomitamment.
1 Une phase de rencontre avec les habitants, humains et non-humains, des territoires donnant lieu à une collecte de témoignages et d’environnements sonores.
2 Ce travail de terrain engage une deuxième phase; la médiation culturelle menée avec les partenaires locaux. Ce sera l’occasion de travailler à la conception d’hydrophones, des micros pouvant enregistrer en milieu aquatique. Ces outils permettront de sensibiliser le public à l’écoute sonore sous-marine. Nous accompagnerons également la construction d’un instrumentarium pédagogique réalisé par un groupe issu des médiations culturelles. Cet instrumentarium sera constitué d’un ensemble d’objets sonores faisant « sonner » l’eau de différentes manières. Cet instrumentarium inspiré des nombreux jeux d’eau sonores découverts par l’homme au fil de ses liens avec cette source de vie, comme les percussions aquatiques, les bols-cloches flottants, les chaînes de pluie (gouttières à bols chantants), les fontaines à bascule, les flûtes à eau, les tambours d’eau, les verres chantant, les gourdes métalliques sera joué en première partie du concert de restitution.
3 Troisièmement, une phase de plusieurs résidences-écriture sur les territoires. Durant cette phase nous construirons parallèlement un instrumentarium adapté à la composition électroacoustique.
4 Quatrièmement une phase de résidence-restitution qui comprend une mise en commun avec le travail effectué en médiation culturelle.
L’approche artistique consistera à mettre en exergue ces différents modes de relations à l’eau et l’environnement dans une composition sonore. Cette composition sera restituée sous forme de spectacle vivant où les compositeurs deviendront interprètes de ces liens en perpétuel mouvement entre la nature et les humains.
Cette approche artistique se nourrit largement de la démarche ethnologique par ses questionnements sur les liens entre les humains et leurs environnements, mais aussi par la méthode employée (entretiens et observations). Les participants au projet pourront être intégrés de différentes façons : en tant que témoins à propos des pratiques et représentations du territoire, en tant qu’acteurs du projet lors des collectes de témoignages, lors des ateliers de captation sonore… Forte de son expérience dans cette démarche, la MANB adapte les ateliers aux publics : scolaires ou adultes…
Les outils de la MANB comme l’octophonie (système de diffusion immersif par huit haut- parleurs), mais aussi des instruments innovants comme le Karlax ou le Zil seront mobilisés pour la composition et la restitution. L’itinérance de ce spectacle vivant est facilement envisageable, que ce soit en extérieur ou en intérieur.
Travail sur l’instrumentarium.
Phase de dessins.
Construction du prototype de Totem en tubes PVC pour l’aspect pratique et modulable de cette matière.
Recherche sur les éléments sonores à inclure dans les Totems.
Rencontres et interviews de quelques acteurs et/ou habitants du territoire.
Notre axe central étant l’eau nous avons cherché à rencontrer des personnes ayant, de près ou de loin, un rapport direct avec cet élément.
Nous avons pu nous entretenir, grâce aux liens fournis par Sébastien RIGAUD du PNR de la Brenne, avec:
Un maçon spéléologue à ses heures perdues.
Une documentaliste.
Un président de club de plongée.
Un maitre nageur.
Un fontainier.
Un technicien rivière.
Une famille de pisciculteur.
Une famille de maraicher.
Un propriétaire de moulin à eau.
Un ancien pompier, référent pluviométrie chez météo france.
Travail mené avec Guillaume dans la perspective d’extraire du « fond et du sens » de ses recueils de paroles afin d’alimenter notre composition musicale.
Une semaine de construction chez Christophe avec Cyrille et Érik.
Fidèles compagnons de bricolage intensif.
Les TOTEMS.
Ils représentent une des étapes du « chemin de l’eau » ce sont les nuages.
Ils sont les supports des jeux d’eau et autres instruments qui seront actionnés pendant le concert.
Le CLEPSYDRE.
Comme son nom l’indique il représente le temps qui passe.
Ce temps est somme toute un peu à relativiser, il est donc ici malléable.
Objectifs de la semaine:
concevoir les pièces des trois Totems et monter l’ensemble pour confirmer tous les détails. Idem pour le Clepsydre qui pour l’instant n’existe même pas en prototype, construit sur les plans des Totems, mais prévu plus grand, il contient un miroir d’eau, beaucoup d’incertitudes encore à éclairer.
Sur la base de nos dessins et suggestions, Christophe, ingénieur de son état, a réalisé plusieurs plans précis qui ont permis de faire fabriquer certaines pièces indispensables à la construction, comme les découpes au laser de pièces métalliques, axes de montage des structures.
Soudures précises au millimètre, découpe et filetages ont ensuite été réalisés dans son atelier à la Barlière.
Une semaine pour tout construire, objectif tenu dans un sprint final digne des travaux de la MANB.
Merci beaucoup à cette très chère équipe sans laquelle rien n’aurait été possible.
Dans le cadre de l’AMI « Création musicale en milieu rural » une part du travail des artistes est d’inviter des habitants à participer à la création.
Pour « L’AIR DE L’EAU » nous avons opté, avec l’accord de Christelle VIAUD Dumiste au sein du PNR de la Brenne et responsable artistique du projet, pour la création d’un collectif (comme nous) qui travaillerait sur les mêmes propositions artistiques (lien entre homme et nature) afin de composer une pièce de musique contemporaine qui sera diffusée en première partie de notre concert le 30 Juin 2024 dans la fontaine asséchée du parc du château d’Azay le Ferron.
Le collectif:
– Classe de CM1/2 de l’école de Pouligny Saint Pierre
– Classe de CM1 de l’école de Mézières en Brenne.
– Classes de violons et classe de violoncelles de l’école de musique du Blanc.
– Groupe du Conseil Municipal des Jeunes d’Azay le Ferron encadré par le CPIE du même lieu.
Nous avons rencontré et enregistré ces jeunes, et moins jeunes, pendant notre temps de résidence à « L’école » de Néons sur Creuse. Lieu dédié aux résidences artistiques, cette ancienne école a été complètement remodelée pour accueillir des artistes en tout genre et leur consacrer un espace de travail modulable, serein, paisible et très bien équipé.
Nous avons fini cette semaine en nous consacrant au premiers tests techniques et sonores de notre instrumentarium.
La MANB (Manufacture des Arts Numériques de Bourges) est une association loi 1901 inscrite au journal Officiel depuis le 1er Août 2017 à Bourges. Compositeurs issus de la classe de composition d'électroacoustique du Conservatoire de Bourges, nous avons décidé de créer cette structure afin de promouvoir la musique électroacoustique sous toutes ses formes.
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